Peste noire





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La peste noire ou mort noire est le nom donné par les historiens modernes à une grande épidémie de peste médiévale, au milieu du XIVe siècle, principalement bubonique, causée par la bactérie Yersinia pestis. Cette épidémie a touché l'Asie, le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et l'Europe. Elle n'est ni la première ni la dernière épidémie de peste, mais elle est la seule à porter ce nom. En revanche, elle est la première grande épidémie de l'histoire à avoir été bien décrite par les chroniqueurs contemporains.


On estime que la peste noire a tué entre 30 et 50 % de la population européenne en cinq ans (1347-1352) faisant environ vingt-cinq millions de victimes. Cette épidémie eut des conséquences durables sur la civilisation européenne, d'autant qu'après cette première vague, la maladie refit ensuite son apparition dans les différents pays touchés.


Elle est considérée comme le début explosif et dévastateur de la deuxième pandémie de peste qui dura, de façon plus sporadique, jusqu'au début du XIXe siècle.




Illustration de la peste noire. Les chroniques de Gilles Li Muisis (1272-1352), abbé de Saint-Martin de Tournai. Bibliothèque royale de Belgique, MS 13076-77, f. 24v.




Sommaire






  • 1 Origines du terme


  • 2 Chroniqueurs et historiens


    • 2.1 Histoire classique


    • 2.2 Histoire multidisciplinaire




  • 3 Épidémies précédentes


  • 4 Chronologie


    • 4.1 Origines


    • 4.2 Diffusion




  • 5 Guerres et peste


    • 5.1 Guerre de Cent Ans


    • 5.2 Autres conflits




  • 6 Conséquences démographiques et socio-économiques


    • 6.1 En Occident


      • 6.1.1 Conséquences économiques


      • 6.1.2 Mortalité et démographie




    • 6.2 Empire byzantin


    • 6.3 Monde musulman




  • 7 Réactions collectives


    • 7.1 Violences contre les Juifs


      • 7.1.1 Déroulement


      • 7.1.2 Interprétations


      • 7.1.3 Trésors de peste




    • 7.2 Processions de flagellants


    • 7.3 Danses maniaques




  • 8 Moyens thérapeutiques


    • 8.1 Remèdes externes


    • 8.2 Remèdes internes


    • 8.3 Moyens religieux et magiques




  • 9 Mesures sociales


    • 9.1 Gestion des décès


    • 9.2 Règlements sanitaires


    • 9.3 Personnels de santé




  • 10 Influences artistiques et culturelles


    • 10.1 Sensibilités religieuses


    • 10.2 Macabre et triomphe de la mort


    • 10.3 Poésie en Islam




  • 11 Dans la littérature moderne


  • 12 Notes et références


  • 13 Voir aussi


    • 13.1 Articles connexes


    • 13.2 Bibliographie


    • 13.3 Filmographie







Origines du terme |


Les contemporains désignent cette épidémie sous de nombreux termes : « grande pestilence », « grande mortalité », « maladie des bosses », « maladie des aines »[1], et plus rarement « peste universelle »[2] (qui doit être compris comme un équivalent de fléau universel). Le terme « peste noire » ou « mort noire » apparaît au XVIe siècle. Il semble que « noir » doive ici être pris au sens figuré (terrible, affreux), sans allusion médicale ou clinique[1].


La popularité de l'expression serait due à la publication, en 1832, de l'ouvrage d'un historien allemand Justus Hecker (de) (1795-1850), Der schwarze Tod im vierzehnten Jahrhundert (La Mort noire au XIVe siècle). L'expression devient courante dans toute l'Europe. En Angleterre, le terme usuel de Black Death (mort noire) apparaît en 1843 dans un livre d'histoire destiné à la jeunesse[1]. Au début du XXIe siècle, Black Death reste le nom habituel de cette peste médiévale pour les historiens anglais et américains. En France, le terme « peste noire » est le plus souvent utilisé[3].


Dans son ouvrage initial de 1832, Hecker dresse la liste des explications de l'emploi de l'adjectif « noir » : le deuil continu, l'apparition d'une comète noire avant l'épidémie, le fait qu'elle ait d'abord frappé les Sarrasins (à peau foncée), la provenance apparente de pays à pierres ou de terres noires, etc.[1] Cet ouvrage est à la base de celui d'Adrien Phillippe[4] paru en 1853 Histoire de la peste noire[5].


Dans le langage médical français, jusqu'aux années 1970, le terme peste noire désignait plus particulièrement les formes hémorragiques de la peste septicémique ou de la peste pulmonaire[6].



Chroniqueurs et historiens |



Histoire classique |


Il ne manque pas d'écrits contemporains de la peste noire, comme la Nuova chronica du chroniqueur florentin Giovanni Villani, lui-même victime de la peste en 1348. Sa chronique s'arrête en 1346, mais elle est poursuivie par son frère Matteo Villani avec le récit détaillé de cette épidémie. Gabriel de Mussis (en) (1280-1356) de Plaisance est l'auteur d'un Historia de morbo en 1348[7].


D'autres chroniqueurs notables sont les continuateurs de la chronique de Guillaume de Nangis à Saint-Denis ; Gilles Le Muisit à Tournai ; Simon de Couvin (?-1367) de Liège[8] ; Baldassarre Bonaiuti (en) dit aussi Marchionne di Coppo Stefani (1336-1385) de Florence[9] ; Louis Heyligen à Avignon et Michel de Piazza à Messine[10].


De nombreux auteurs, médicaux ou non, ont donné par la suite avis et observations, mais une approche proprement historique de la peste médiévale n'apparait qu'à la fin du XVIIIe siècle avec Christian Gottfried Gruner (de)(1744-1815) et Kurt Sprengel.


Le tournant décisif est pris en 1832 par Justus Hecker (voir section précédente) qui insiste sur l'importance radicale de la peste noire comme facteur de transformation de la société médiévale. L'école allemande place la peste noire au centre des publications médico-historiques avec Heinrich Haeser (de)(1811-1885), et August Hirsch(1817-1894). Ces travaux influencent directement l'école britannique, aboutissant au classique The Black Death (1969) de Philip Ziegler[7].



Histoire multidisciplinaire |


La découverte de la bactérie causale Yersinia pestis (1894), puis celle du rôle des rats et des puces, permettent de déterminer un modèle médical de la peste moderne dans la première moitié du XXe siècle. Ce modèle s'impose aux historiens pour expliquer et évaluer la peste médiévale. En même temps, ces chercheurs ont accès à de nouvelles sources locales officielles et semi-officielles, avec l'arrivée dans la deuxième moitié du XXe siècle de démographes, d'épidémiologistes et de statisticiens[7].


Le modèle initial de Hecker, représentatif d'une « histoire-catastrophe », quasi-apocalyptique, est corrigé et nuancé. La peste noire n'est plus un séparateur radical ou une rupture totale dans l'histoire européenne. Nombre de ses effets et de ses conséquences étaient déjà en cours dès le début du XIVe siècle ; ces tendances ont été exacerbées et précipitées par l'arrivée de l'épidémie. Le phénomène « peste noire » est mieux situé dans un contexte historique plus large à l'échelle séculaire d'un ou plusieurs cycles socio-économiques et démographiques[7].


Un apport décisif est celui de Jean-Noël Biraben qui publie en 1975, Les hommes et la peste en France et dans les pays européens et méditerranéens, où la peste noire (Europe occidentale 1348-1352) n'est qu'un aspect particulier des épidémies de peste qui se succèdent jusqu'au XVIIIe siècle, englobant l'Europe de l'Est et le Moyen-Orient. Il est suivi en cela par nombre de chercheurs qui abordent la peste à différentes échelles spatio-temporelles, pas forcément centrées sur la peste noire du milieu du XIVe siècle, la plus connue du grand public.


À la fin du XXe siècle, l'étude de la peste noire médiévale apparait de plus en plus comme multidisciplinaire avec le traitement des données par informatique, l'arrivée de nouvelles spécialités comme l'archéozoologie ou la paléomicrobiologie. Si les notions initiales des premiers historiens paraissent se confirmer en général, la peste noire historique comporte encore de nombreux problèmes en suspens, non
ou mal expliqués. Au début du XXIe siècle, elle reste un objet vivant de recherches : mises en cause de données acquises, disputes et controverses avec pluralité de points de vue[7].



Épidémies précédentes |


Le Moyen Âge fut traversé par de nombreuses épidémies, plus ou moins virulentes et localisées, et souvent mal identifiées (incluant grippe, variole et dysenteries)[2] qui se déclenchèrent sporadiquement. Hormis peut-être le mal des ardents, qui est dû à une intoxication alimentaire, la plupart de ces épidémies coïncidèrent avec les disettes ou les famines qui affaiblissaient l'organisme. Le manque d'hygiène général et notamment la stagnation des eaux usées dans les villes, la présence de marais dans les campagnes favorisèrent également leur propagation. Ainsi, l'Artois est frappé à plusieurs reprises en 1093, 1188, 1429, 1522.


La peste de Justinien (541-767) qui ravagea l'Europe méditerranéenne a été clairement identifiée comme peste due à Yersinia pestis. Elle fut sûrement à l’origine d'un déficit démographique pendant le haut Moyen Âge en Europe du Sud, et indirectement, de l'essor économique de l'Europe du Nord. Elle est considérée comme la première pandémie de peste ; sa disparition au VIIIe siècle reste énigmatique[11].


L'absence de la peste en Europe dura six siècles. Quand l'Europe occidentale fut de nouveau touchée en 1347-1348, la maladie revêtit tout de suite, aux yeux des contemporains, un caractère de nouveauté et de gravité exceptionnelle, qui n'avait rien de commun avec les épidémies habituelles[12]. Pour les plus lettrés, les seules références connues pouvant s'en rapprocher étaient la peste d'Athènes et la peste de Justinien.


Contrairement à la peste de Justinien, qui fut essentiellement bubonique, la peste noire, due aussi à Yersinia pestis[13], a pu revêtir deux formes : principalement bubonique[14],[15], mais aussi pulmonaire[16], selon les circonstances.



Chronologie |



Origines |


La peste bubonique sévissait de façon endémique en Asie centrale, et ce sont probablement les guerres entre Mongols et Chinois qui provoquèrent les conditions sanitaires permettant le déclenchement de l'épidémie. Elle se déclara en 1334, dans la province chinoise du Hubei et se répandit rapidement dans les provinces voisines : Jiangxi, Shanxi, Hunan, Guangdong, Guangxi, Henan et Suiyuan, une ancienne province disputée entre les empires mongol et chinois.


En 1346, les Mongols de la Horde d'or assiégèrent Caffa, comptoir et port génois des bords de la mer Noire, en Crimée. L’épidémie, ramenée d'Asie centrale par les Mongols, toucha bientôt les assiégés, car les Mongols catapultaient les cadavres des leurs par-dessus les murs pour infecter les habitants de la ville[17]. Cependant, pour Boris Bove il est plus plausible d'imaginer que la contamination des Génois fut le fait des rats passant des rangs mongols jusque dans la ville[17], ou selon une théorie récente, plutôt des gerbilles[18].


Le siège fut levé, faute de combattants valides en nombre suffisant : Génois et Mongols signèrent une trêve. Les bateaux génois, pouvant désormais quitter Caffa, disséminèrent la peste dans tous les ports où ils faisaient halte : Constantinople est la première ville touchée en 1347[19], puis la maladie atteignit Messine fin septembre 1347[20], Gênes et Marseille en novembre de la même année. Pise est atteinte le premier janvier 1348, puis c'est le tour de Spalato, la peste gagnant les ports voisins de Sebenico et de Raguse, d'où elle passe à Venise le 25 janvier 1348. En un an, la peste se répandit sur tout le pourtour méditerranéen[12].


Dès lors, l'épidémie de peste s'étendit à toute l’Europe du sud au nord, y rencontrant un terrain favorable : les populations n’avaient pas d’anticorps contre cette variante du bacille de la peste, et elles étaient déjà affaiblies par des famines répétées[21], des épidémies[22], un refroidissement climatique sévissant depuis la fin du XIIIe siècle, et des guerres[23].


Entre 1345 et 1350, le monde musulman et la région du croissant fertile sont durement touchés par la pandémie. Partie de Haute-Égypte, elle touche Alexandrie, Le Caire en septembre 1348, atteint la Palestine, touche successivement Acre, Sidon, Beyrouth, Tripoli et Damas en juin de la même année. Au plus fort de l'épidémie, Damas perd environ 1 200 habitants par jour et Gaza est décimée. La Syrie perd environ 400 000 habitants, soit un tiers de sa population. C'est après avoir ravagé l'Égypte, le Maghreb et l'Espagne qu'elle se répand finalement en Europe[24].



Diffusion |




Carte de diffusion de la peste noire.


La peste noire se répandit comme une vague et ne s’établit pas durablement aux endroits touchés. Le taux de mortalité moyen d’environ trente pour cent de la population totale, et de soixante à cent pour cent de la population infectée, est tel que les plus faibles périssent rapidement, et le fléau ne dure généralement que six à neuf mois.


Depuis Marseille, en novembre 1347, elle gagna rapidement Avignon, en janvier 1348, alors cité papale et carrefour du monde chrétien : la venue de fidèles en grand nombre contribuant à sa diffusion. Début février, la peste atteint Montpellier puis Béziers. Le 16 février 1348, elle est à Narbonne, début mars à Carcassonne, fin mars à Perpignan. Fin juin, l'épidémie atteint Bordeaux. À partir de ce port, elle se diffuse rapidement à cause du transport maritime. L'Angleterre est touchée le 24 juin 1348. Le 25 juin 1348, elle apparaît à Rouen, puis à Pontoise et Saint-Denis. Le 20 août 1348, elle se déclare à Paris. En septembre, la peste atteint le Limousin et l'Angoumois, en octobre le Poitou, fin novembre Angers et l'Anjou. En décembre, elle est apportée à Calais depuis Londres. En décembre 1348, elle a envahi toute l’Europe méridionale, de la Grèce au sud de l'Angleterre. L'hiver 1348-1349 arrête sa progression, avant qu'elle resurgisse à partir d'avril 1349.


En décembre 1349, la peste a traversé presque toute l’Allemagne, le Danemark, l’Angleterre, le Pays de Galles, une bonne partie de l’Irlande et de l’Écosse. Elle continue ensuite sa progression vers l'est et vers le nord dévastant la Scandinavie en 1350, puis l'Écosse, l'Islande ou le Groenland, s'arrêtant aux vastes plaines inhabitées de Russie en 1351[25].


Cette progression n'est pas homogène, les régions n'étant pas toutes touchées de la même façon. Des villages, et même certaines villes sont épargnés comme Bruges, Milan et Nuremberg, au prix de mesures d'exclusion drastiques, et il en est de même pour le Béarn et la Pologne (carte ci-contre).



Guerres et peste |


Les rapports entre la guerre et la peste s'expliquent de diverses façons selon les historiens, et il n'est pas toujours facile de distinguer entre les causes et les conséquences.



Guerre de Cent Ans |


Les effets de la guerre de Cent Ans paraissent limités, car elle n'est jamais totale (étendue géographique, et dans le temps – existence de trêves). L'impact démographique direct est faible et ne concerne que la noblesse, quoique des massacres de populations civiles soient attestés (Normandie, région parisienne). Il n'en est pas de même pour les conséquences indirectes liées à l'économie de guerre (pillage, rançon, impôts) : la misère, l'exode, la mortalité sont aggravées. Le bon sens populaire associe la guerre et la peste dans une même prière : « Délivre-nous, Seigneur, de la faim, de la peste et de la guerre »[26].


La peste frappe Anglais et Français, assiégeants et assiégés, militaires et civils, sans distinction. Cette mortalité par peste est sans commune mesure avec les pertes militaires au combat (une armée de plus de dix mille hommes est exceptionnelle à l'époque). La guerre tue par milliers sur un siècle, la peste par millions en quelques années. La peste est l'occasion d'interrompre la guerre de Cent Ans (prolongation de la trêve de Calais en 1348), mais elle n'en change guère le cours en profondeur[27]. La proximité de la peste limite les opérations (évitement des zones où la peste sévit). Des bandes armées ont pu disséminer la peste, mais aucune armée n'a été décimée par la peste durant la guerre de Cent Ans[28].



Autres conflits |


D'autres historiens insistent sur l'influence de la peste sur le déroulement des opérations militaires, surtout en Méditerranée : la fin du siège de Caffa, la mort d'Alphonse XI lors du siège de Gibraltar, la réduction des flottes de guerre de Venise et de Gênes, l'ouverture de la frontière nord de l'Empire byzantin, la dispersion de l'armée de Abu Al-Hasan après la bataille de Kairouan (1348), l'arrêt de la Reconquista pour plus d'un siècle, etc.[29].



Conséquences démographiques et socio-économiques |


La peste eut d'importantes conséquences démographiques, économiques, sociales et religieuses.


Les sources documentaires sont assez éparses et couvrent généralement une période plus longue, mais elles permettent une approximation assez fiable. Les historiens s’entendent pour estimer la proportion de victimes entre 30 et 50 % de la population européenne, soit entre 25 et 45 millions de personnes[30]. Les villes sont plus durement touchées que les campagnes, du fait de la concentration de la population, et aussi des disettes et difficultés d’approvisionnement provoquées par la peste.


Au niveau mondial, il faut ajouter les morts de l’empire byzantin, du monde musulman, du Moyen-Orient, de la Chine et de l’Inde. Selon les sources la peste noire a fait entre 75 et 200 millions de morts lors du XIVe siècle[31],[32][réf. à confirmer].



En Occident |


Article détaillé : Occident au XIVe siècle.


Conséquences économiques |


Il existait déjà une récession économique depuis le début du XIVe siècle, à cause des famines et de la surpopulation (il y eut en 1315-1317 une grande famine européenne qui stoppa l'expansion démographique et prépara le terrain à l'épidémie).


Cette récession se transforme en chute brutale et profonde avec la peste noire et les guerres. La main-d’œuvre vint à manquer et son coût augmenta, en particulier dans l’agriculture. De nombreux villages furent abandonnés, les moins bonnes terres retournèrent en friche et les forêts se redéveloppèrent. En France, la production céréalière et celle de la vigne chutent de 30 à 50 % selon les régions[26].





Louis Duveau : La peste d'Elliant (1849, musée des beaux-arts de Quimper).


Les propriétaires terriens furent contraints de faire des concessions pour conserver (ou obtenir) de la main-d'œuvre, ce qui se solda par la disparition du servage. Les revenus fonciers s’effondrèrent à la suite de la baisse du taux des redevances et de la hausse des salaires ; le prix des logements à Paris fut divisé par quatre[33].


Les villes se désertifièrent les unes après les autres, la médecine de l’époque n'ayant ni connaissance de la cause de l'épidémie ni les capacités de la juguler. Cette désertification est compensée par un exode rural pour repeupler les villes, dans un rayon moyen de 30 à 40 km autour des villes et des gros bourgs[34].



Mortalité et démographie |


La France ne retrouva son niveau démographique de la fin du XIIIe siècle que dans la seconde moitié du XVIIe siècle.


En France, entre 1340 et 1440, la population a décru de 17 à 10 millions d'habitants, une diminution de 41 %. Le registre paroissial de Givry, en Saône-et-Loire, l'un des plus précis, montre que pour environ 1 500 habitants, on a procédé à 649 inhumations en 1348, dont 630 de juin à septembre, alors que cette paroisse en comptait habituellement environ 40 par an : cela représente un taux de mortalité de 40,6 %. D'autres registres, comme celui de l'église Saint-Nizier de Lyon, confirment l'ordre de grandeur de Givry (30 à 40 %)[35].


Une source indirecte de mortalité est l'étude des séries de legs et testaments enregistrés. Par exemple, les historiens disposent des données de Besançon et de Saint-Germain-l'Auxerrois, qui montrent que les legs et les testaments décuplent en 1348-1349 par rapport à 1347, mais l'interprétation en est délicate. « La mortalité précipite les hommes non seulement chez leur confesseur mais aussi chez leur notaire […] mais [cela] ne permet pas de la mesurer, car il dépend autant, sinon plus, de la peur de la maladie qui multiplie les legs pieux que des ravages de la peste elle-même »[36].


C'est l’Angleterre qui nous a laissé le plus de témoignages ce qui, paradoxalement, rend l'estimation du taux de mortalité plus ardue, les historiens fondant leurs calculs sur des documents différents : les chiffres avancés sont ainsi entre 20 et 50 %. Cependant, les estimations de population entre 1300 et 1450 montrent une diminution située entre 45 et 70 %. Même si là encore la baisse de population était en cours avant l'éclosion de la peste, ces estimations rendent le 20 % peu crédible, ce taux étant fondé sur des documents concernant des propriétaires terriens laïcs qui ne sont pas représentatifs de la population, essentiellement paysanne et affaiblie par les disettes.


Dans le reste de l'Europe, les historiens tentent d'approcher la mortalité globale par des études de mortalité de groupes socio-professionnels mieux documentés (médecins, notaires, conseillers municipaux, moines, évêques). En Italie, il est communément admis par les historiens que la peste a tué au moins la moitié des habitants. Seule Milan semble avoir été épargnée, quoique les sources soient peu nombreuses et imprécises à ce sujet. Des sources contemporaines citent des taux de mortalité effrayants : 80 % des conseillers municipaux à Florence, 75 % à Venise, etc.. En Espagne, la peste aurait décimé de 30 à 60 % des évêques[37].


En Autriche, on a compté 4 000 victimes à Vienne, et 25 à 35 % de la population mourut. En Allemagne, les populations citadines auraient diminué de moitié, dont 60 % de morts à Hambourg et Brême[38].



Empire byzantin |


L'Empire byzantin est durement touché lui aussi par la peste, il connaîtra 9 vagues épidémiques majeures du XIVe siècle au XVe siècle (de 1347 à 1453) d'une durée moyenne de trois ans espacées d'une dizaine d'années. La peste touche particulièrement Constantinople, le Péloponnèse, la Crète et Chypre. L'Empire byzantin était déjà affaibli par des défaites militaires, des guerres civiles, des tremblements de terre. La peste noire accentue ce déclin, mais ne le provoque pas.


L'histoire médiévale de cette région montre que les ambitions économiques, politiques et militaires étaient plus fortes que la peur de la peste. Le commerce et la guerre contribuent à propager la peste, les hommes finissant par intégrer la peste comme une part de leur vie[19]. Après la chute de Constantinople, l'Empire ottoman subit aussi des épidémies graves de peste jusqu'à la fin du XVIe siècle.



Monde musulman |


Ibn Khaldoun, philosophe et historien musulman du XIVe siècle évoque dans son autobiographie la perte de plusieurs membres de sa famille dont sa mère en 1348 et son père en 1349, de ses amis et de ses professeurs à cause de la peste. Il évoquera à plusieurs reprises ces événements tragiques, notamment dans la Muqaddima (traduite en Prolégomènes)[39] :



« Une peste terrible vint fondre sur les peuples de l'Orient et de l'Occident ; elle maltraita cruellement les nations, emporta une grande partie de cette génération, entraîna et détruisit les plus beaux résultats de la civilisation. Elle se montra lorsque les empires étaient dans une époque de décadence et approchaient du terme de leur existence ; elle brisa leurs forces, amortit leur vigueur, affaiblit leur puissance, au point qu'ils étaient menacés d'une destruction complète. La culture des terres s'arrêta, faute d'hommes ; les villes furent dépeuplées, les édifices tombèrent en ruine, les chemins s'effacèrent, les monuments disparurent ; les maisons, les villages, restèrent sans habitants ; les nations et les tribus perdirent leurs forces, et tout le pays cultivé changea d'aspect[40]. »



Le bilan humain en Méditerranée orientale est difficile à évaluer, faute de données fiables (manque de données démographiques, difficulté à interpréter les chroniques)[19]. On cite quelques données significatives : la plus grande ville de l'islam à cette époque était Le Caire avec près d'un demi-million d'habitants, sa population chute en quelques années à moins de 300 000. La ville avait 66 raffineries de sucre en 1324, elle en a 19 en 1400. Le repeuplement des grandes villes se fait aux dépens des campagnes, dans un contexte de disettes et de crises économiques et monétaires. En Égypte, le dirham d'argent est remplacé par du cuivre. Alexandrie qui comptait encore 13 000 tisserands en 1394, n'en compte plus que 800 en 1434[41].



Réactions collectives |


Face à la peste, et à l'angoisse de la peste, les populations réagissent par la fuite, l'agressivité ou la projection. La fuite est générale pour ceux qui en ont la possibilité. Elle se manifeste aussi dans le domaine moral, par une fuite vers la religion, les médecins, charlatans et illuminés, ou des comportements par mimétisme (manie dansante, hystérie collective...)[42].


L'agressivité se porte contre les juifs et autres prétendus semeurs de peste (lépreux, sorcières, mendiants...), ou contre soi-même (de l'auto-flagellation jusqu'au suicide). La projection est l'œuvre des artistes : les figurations de la peste et leurs motivations seraient comme une sorte d'exorcisme, modifiant les sensibilités[42].


Les réactions les plus particulières à l'époque de la peste noire sont les violences contre les juifs et les processions de flagellants[42].



Violences contre les Juifs |


Article détaillé : Accusation d'empoisonnement des puits contre les Juifs.


Déroulement |


Dès 1348, la peste provoque des violences[43]antijuives en Provence. Les premiers troubles éclatent à Toulon dans la nuit du 13 au 14 avril 1348. Quarante Juifs sont tués et leurs maisons pillées. Les massacres se multiplient rapidement en Provence, les autorités sont dépassées à Apt, Forcalquier et Manosque. La synagogue de Saint-Rémy-de-Provence est incendiée (elle sera reconstruite hors de la ville en 1352). En Languedoc, à Narbonne et Carcassonne, les Juifs sont massacrés par la foule. En Dauphiné, des Juifs sont brûlés à Serres. N'arrivant pas à maîtriser la foule, le dauphin Humbert II fait arrêter les Juifs pour éviter les massacres. Ceux-ci se poursuivent à Buis-les-Baronnies, Valence, la-Tour-du-Pin, et Pont-de-Beauvoisin où des Juifs sont précipités dans un puits qu'on les accuse d'avoir empoisonné. D'autres massacres ont lieu en Navarre et en Castille. Le 13 mai 1348, le quartier juif de Barcelone est pillé[44].


En juillet, le roi de France Philippe VI fait traduire en justice les Juifs accusés d'avoir empoisonné les puits. Six Juifs sont pris à Orléans et exécutés. Le 6 juillet, le pape Clément VI d'Avignon proclame une bulle en faveur des juifs, montrant que la peste ne fait pas de différences entre les juifs et les chrétiens, il parvient à prévenir les violences au moins dans sa ville. Ce n'est pas le cas en Savoie qui, au mois d'août, devient théâtre de massacres[45]. Le comte tente de protéger puis laisse massacrer les Juifs du ghetto de Chambéry. En octobre, les massacres continuent dans le Bugey, à Miribel et en Franche-Comté.


Les ashkénazes d’Allemagne sont victimes de pogroms. En septembre 1348, les Juifs de la région du château de Chillon sur le lac Léman, en Suisse, sont torturés jusqu’à ce qu’ils avouent, faussement, avoir empoisonné les puits[46]. Leurs confessions provoquent la fureur de la population qui se livre à des massacres et à des expulsions. Trois cents communautés sont détruites ou expulsées. Six mille Juifs sont tués à Mayence. Nombre d'entre eux fuient vers l’est, en Pologne et en Lituanie.


Plusieurs centaines de Juifs sont brûlés vifs lors du pogrom de Strasbourg le 14 février 1349[47], d'autres sont jetés dans la Vienne à Chinon. En Autriche, le peuple, pris de panique, s’en prend aux communautés juives, les soupçonnant d’être à l'origine de la propagation de l’épidémie, et Albert II d'Autriche doit intervenir pour protéger ses sujets juifs[48].



Interprétations |


Si les accusations contre les Juifs ont été largement répandues dans toute l'Europe occidentale, les violences se concentrent dans des régions bien limitées (essentiellement l'axe économique Rhône-Rhin). En Angleterre, les juifs sont accusés, mais non persécutés, à cause de leur évidente pauvreté (les banquiers et riches commerçants juifs ont été expulsés par Édouard Ier en 1290). En Scandinavie, on accuse aussi les juifs d'empoisonner les puits, mais il n'y a pas de juifs en Scandinavie. Les chroniqueurs arabes, de leur côté, ne mentionnent pas de persécutions contre les juifs à l'occasion d'épidémie de peste[45].


Selon J.N. Biraben, la richesse des juifs aurait pu jouer un rôle, à cause de leur situation de prêteurs, faisant appel aux autorités pour faire régler leurs débiteurs. La peste aurait mis le feu aux poudres, les héritiers des morts de peste se retrouvant débiteurs. Ce qui est bien documenté pour la région de Strasbourg, mais reste hypothétique ailleurs[45].


Un autre facteur est l'importance des communautés médicales juives en Provence. Un tiers à la moitié des médecins provençaux connus du XIIe siècle au XVe siècle étaient juifs. La petite ville de Trets comptait 6 médecins juifs et 1 chrétien au XIVe siècle[49]. L'arrivée de la peste noire en Provence met à nu l'impuissance de la médecine, et par là celles des juifs, dont le savoir des remèdes se serait retourné contre eux. On croit qu'ils reçoivent, par la mer, des sachets de venins réduits en poudre qu'ils sont chargés de répandre[45].




Bague juive de mariage, début du XIVe siècle, or ciselé et émaillé, du trésor de Colmar.



Trésors de peste |


Lorsque les violences s'approchent des régions rhénanes, durant l'hiver 1348-1349, les familles juives d'Allemagne cachent monnaies et objets précieux dans ou autour de leur maison. De nombreux trésors furent enterrés, puis abandonnés à la mort ou la fuite de leurs propriétaires. Plusieurs de ces trésors ont été retrouvés, témoignant de la vie et de la culture juives médiévales en Europe[50].


Parmi les trésors étudiés les plus importants, le premier a été trouvé à Weissenfels en 1826, d'autres à Colmar (1863), Bale (1937), Cologne (1953)... Le plus récent à Erfurt (1998).


Le trésor de Colmar appartient au Musée de Cluny de Paris[50] qui l'a exposé avec le trésor d'Erfurt du 25 avril au 3 septembre 2007. Ces trésors sont identifiés par leur lieu de découverte, leur datation et la présence caractéristique de bague juive de mariage[51].



Processions de flagellants |


Article détaillé : Flagellant.

Des groupes de flagellants se formèrent, tentant d’expier les péchés, avant la parousie, dont ils pensaient que la peste était un signe annonciateur. Cependant ces groupes restaient extrêmement marginaux, la plupart des chrétiens firent face au fléau par une piété redoublée, mais ordinaire et encadrée par un clergé qui réprouvait les excès[52].



Danses maniaques |


La disparition d'une partie du clergé entraine une résurgence de comportements superstitieux ou inhabituels, liés à une contagion par imitation lors de stress collectifs. C'est notamment le cas de la manie dansante ou épidémie de danse de saint Guy (ou saint Vit ou Vitus)[53].


Déjà signalée dans les populations germaniques au XIIIe siècle, une manie dansante survient en Lusace, près de la Bohême, en 1349 à l'approche de la peste noire. Des femmes et jeunes filles se mettent à danser devant un tableau de la Vierge[53]. Elles dansent nuit et jour, jusqu'à l'effondrement, puis se relèvent et recommencent après sommeil réparateur[54].


En juillet 1374, dans plusieurs villes du Rhin moyen, des centaines de jeunes couples se mettent à danser et chanter, circulant dans toute la région. Les spectateurs les imitent et se joignent à eux. Le mauvais temps les arrête en novembre, mais chaque été, ils recommencent jusqu'en 1381. Le clergé parvient à les contrôler en les conduisant en pèlerinage[53].


Le phénomène se retrouve en 1414 à Strasbourg pour se répandre en Allemagne, il se répète en 1463 à Metz[53]. Le plus documenté est l'épidémie dansante de 1518 à Strasbourg, liée à des tensions sociales et économiques, et aux menaces répétées et imprévisibles d'épidémie de peste[54].


Le rapport entre ces danses maniaques et le thème artistique de la danse macabre reste peu clair[54].



Moyens thérapeutiques |


La médecine du XIVe siècle était impuissante face à la peste qui se répandait. Les médecins utilisent plusieurs moyens simultanément, car nul traitement unique n'avait de succès ou même n'était meilleur qu'un autre. La médecine galénique, basée sur la théorie humorale, privilégiait les remèdes internes, mais dès le début de la peste noire, elle tend à être supplantée par une théorie miasmatique basée sur un « venin » ou « poison ». Le poison de la peste pénètre le corps à partir de l'air infect ou par contact (personne ou objet).


Toutes ces théories pouvaient se combiner : la peste est une pourriture des humeurs due à un poison transmissible par air ou par contact. Ce poison est un principe de corruption provenant des profondeurs de la terre (substances en putréfaction), qui s'élève dans l'air, à la suite d'un phénomène « météo-géologique » (tremblement de terre, orage...) ou astronomique (conjonction de planètes, passage de comète...), et qui retombe sur les humains[55].


La distinction entre moyens médicaux, religieux, folkloriques ou magiques est faite par commodité, mais l'ensemble de ces moyens étaient largement acceptés par les médecins savants de l'époque[56].



Remèdes externes |


Ils ont pour but, soit d'empêcher la pénétration du poison, soit de faciliter sa sortie. Contre l'air empoisonné, on se défend par des fumigations de bois ou de plantes aromatiques.


Les médecins arabes avaient remarqué que les survivants de peste étaient plutôt ceux dont les bubons avaient suppuré (vidés de leur pus). Selon leur avis, les chirurgiens de peste incisaient ou cautérisaient les bubons. Ils le faisaient dans des conditions non-stériles, occasionnant souvent des surinfections.


De nombreux onguents de diverses compositions (herbes, minéraux, racines, térébenthine, miel…) pouvaient enduire les bubons et le reste du corps (à visée préventive ou curative). On utilisait parfois des cataplasmes à base de produits répugnants (crapauds, asticots, bile et fiente d'origines diverses…) selon l'idée que les poisons attirent les poisons[57]. Ainsi les parfums empêchent la pénétration du poison, et les mauvaises odeurs facilitent sa sortie.


Les saignées avaient pour but d'évacuer le sang corrompu, ce qui le plus souvent affaiblissait les malades.


Les bains chauds, les activités physiques qui provoquent la sudation comme les rapports sexuels sont déconseillés, car ils ouvrent les pores de la peau rendant le corps plus vulnérable aux venins aériens.



Remèdes internes |


La médecine de Galien insiste sur les régimes alimentaire et de vie. Selon la théorie des humeurs, la putréfaction est de nature « chaude et humide », elle doit être combattue par des aliments de nature « froide et sèche », faciles à digérer. La liste et les indications de tels aliments varient selon les auteurs de l'époque[58].


Une attitude morale tempérée est protectrice car les principales passions qui ouvrent le corps à la pestilence sont la peur, la colère, le désespoir et la folie.


Les contre-poisons utilisés sont des herbes telles que la valériane, la verveine, ou des produits composés complexes connus depuis l'Antiquité comme la thériaque. Les antidotes minéraux sont des pierres ou métaux précieux, décapés ou réduits en poudre, pour être avalés en jus, sirop, ou liqueur : or, émeraude, perle, saphir[57].


Les remèdes visent à expulser le poison, ce sont les émétiques, les purgatifs, les laxatifs, ce qui épuisait les malades plus qu'autre chose.



Moyens religieux et magiques |


L'Église organise des processions religieuses solennelles pour éloigner les démons[59], ou des actes de dévotion spectaculaire pour apaiser la colère divine, par exemple la confection de cierges géants, la procession à pieds nus, les messes multiples simultanées ou répétées[60].


Le culte à la Vierge cherche à répéter le miracle survenu à Rome en 590. Cette année-là, lors de la peste de Justinien, une image de la vierge censée peinte par saint Luc, promenée dans Rome, dissipa aussitôt la peste. À ce culte s'ajoute celui des saints protecteurs de la peste : saint Sébastien et saint Roch[61].


Des amulettes et talismans sont portés comme le symbole visible d'un pouvoir invisible, par les juifs, les chrétiens et les musulmans. Les musulmans portent des anneaux où sont inscrits des versets du Coran, quoique l'opinion des lettrés diverge sur ce point, de nombreux textes musulmans sur la peste recommandent des amulettes, incantations et prières contre la peste provenant non pas d'Allah, mais des démons ou djinns[56].


En Occident, en dépit de la désapprobation de l'Église, les chrétiens utilisent charmes, médaillons, textes de prière suspendus autour du cou. L'anneau ou la bague ornée d'un diamant ou d'une pierre précieuse, portée à la main gauche, vise à neutraliser la peste et tous les venins. C'est l'origine magique, à partir de la pharmacopée arabe, du solitaire ou bague de fiancailles des pays occidentaux[62].



Mesures sociales |



Gestion des décès |


Par leur nombre, les morts ont posé un problème aigu au cours de la peste noire. D'abord pour les évaluer, l'habitude sera prise de recensements réguliers, avant et après chaque épidémie. Le clergé sera chargé d'établir les enregistrements des décès et l'état civil. De nouveaux règlements interdisent de vendre les meubles et vêtements des morts de peste. Leurs biens, voire leur maison, sont souvent brûlés. Dès 1348, des villes établissent de nouveaux cimetières en dehors d'elles, Il est désormais interdit d'enterrer autour des églises, à l'intérieur même des villes, comme on le faisait auparavant[63].


Les règlements de l'époque indiquent que l'on devait enterrer les cadavres de pestiférés au plus tard six heures après la mort. La tâche est extrêmement dangereuse pour les porteurs de morts, qui viennent bientôt à manquer. On paye de plus en plus cher les ensevelisseurs qui seront, dans les siècles suivants, affublés de noms et d'accoutrements divers selon les régions (vêtus de cuir rouge avec grelots aux jambes, ou de casaques noires à croix blanche)[64].


En dernière ressource on utilise la main-d'œuvre forcée : prisonniers de droit commun, galériens, condamnés à mort… à qui on promet grâce ou remises de peine. Ces derniers passent dans les maisons ou ramassent les cadavres dans les rues pour les mettre sur une charrette. Ils sont souvent ivres, voleurs et pilleurs. Des familles préfèrent enterrer leurs morts dans leur cave ou jardin, plutôt que d'avoir affaire à eux[64].


Lorsque les rites funéraires d'enterrement y compris en fosse commune ne sont plus possibles de par l'afflux de victimes, les corps peuvent être immergés comme en la Papauté d'Avignon dans le Rhône en 1348, dont les eaux ont été bénies pour cela par le Pape. De même, à Venise des corps sont jetés dans le Grand Canal, et un service de barges est chargé de les repêcher[65]. Les sources mentionnent rarement l'incinération de cadavres, comme à Catane en 1347 où les corps des réfugiés venus de Messine sont brûlés dans la campagne pour épargner à la ville la puanteur des bûchers[63].


Pour les trois religions monothéistes, le respect du mort est essentiel, la promesse de vie éternelle et de résurrection dissuade en fait toute crémation ou autre forme de destruction de l'intégrité corporelle. Le rite funéraire est simplifié et abrégé, mais maintenu autant que possible, mais lorsque les membres du clergé eux-mêmes disparaissent, mourir de peste sans aucun rituel devient encore plus terrifiant pour les chrétiens. En pays d'islam, la difficulté de maintenir les rites est plus supportable pour les musulmans car mourir de peste fait partie des cinq martyrs (chahid). Comme la mort lors du djihad, elle donne accès immédiat au Paradis[66].


En Occident, durant la peste noire, la lutte contre les pillages et les violences de foule, est d'abord assurée par les sergents de ville ordinaires. Plus tard, les conseils municipaux engageront des troupes spéciales chargées de garder, en temps de peste, les villes désertées par leurs habitants[67].



Règlements sanitaires |


Au début du XIVe siècle, les règlements d'hygiène publique sont pratiquement inexistants, à l'exception de quelques grandes villes d'Italie comme Florence (surveillance du ravitaillement, dont la qualité des viandes, et de la santé des habitants). La peste noire prend la population au dépourvu, et elle sera le point de départ des administrations de santé en Europe. Dès 1348 (première année de la peste noire) plusieurs villes italiennes se dotent d'un règlement de peste : Pistoie, Venise, Milan, Parme... comme Gloucester en Angleterre. Ces villes interdisent l'entrée des voyageurs et des étrangers venant de lieux infectés[68].


Les premières villes à édicter un isolement radical de la ville elle-même sont Reggio en 1374, Raguse en 1377, Milan (1402) et Venise (1403). Ces premières mesures sont des tentatives et des tâtonnements, le plus souvent par emprunts d'une ville à l'autre. Elles sont très diverses, depuis l'interdiction de donner le sang des saignées des pestiférés aux pourceaux (Angers, 1410) jusqu'à l'interdiction de vendre des objets appartenant à des pestiférés (Bruxelles, 1439)[68].


Les premiers isolements préventifs (quarantaine) apparaissent à Raguse (Dubrovnik depuis 1918) en 1377, tous ceux qui arrivent d'un lieu infecté doivent passer un mois sur une île avant d'entrer dans la ville. Venise adopte le même système la même année en portant le délai à 40 jours, comme Marseille en 1383. Ce système est adopté par la plupart des ports européens durant le XVe siècle[69].


La quarantaine sur terre est adoptée d'abord en Provence (Brignoles, 1464), et se généralise pour les personnes et les marchandises durant le XVIe siècle[69]. C'est aussi en Provence (Brignoles 1494, Carpentras 1501) qu'apparait le « billet de santé » ou passeport sanitaire délivré aux voyageurs sortant d'une ville saine, et exigé par les autres villes pour y entrer. L'usage du billet de santé se répand lentement et ne se généralise que vers le début du XVIIe siècle (Paris, 1619)[70].


Peu à peu se mettent en place des « règlements de peste », de plus en plus élaborés au fil du temps : c'est le cas des villes en France à partir du XVe siècle. L'application de ces mesures dépend d'un « bureau de santé » composé de plusieurs personnes ou d'une seule dite « capitaine de santé », le plus souvent dotés d'un pouvoir dictatorial en temps de peste. Cette institution apparait d'abord en Italie et en Espagne, puis elle gagne le sud-est de la France à la fin du XVe siècle. Elle s'étend lentement au nord de la France (Paris, 1531)[71].


Durant le XVIe siècle, ces règlements sont codifiés par les parlements provinciaux, ajustés et précisés à chaque épidémie au cours du XVIIe siècle. Ils relèvent du niveau gouvernemental au début du XVIIIe siècle[71].



Personnels de santé |


À la fin du XIIIe siècle, quelques villes italiennes engagent des médecins pour soigner les pauvres (en dehors des œuvres de charité de l'Église). À l'arrivée de la peste, de nouveaux médecins sont engagés à prix d'or (par manque de candidats). En 1348, c'est le cas d'Orvieto et d'Avignon. Des médecins de peste sont ainsi engagés durant les XVe et XVIe siècles, de même que des chirurgiens, apothicaires, infirmiers, sages-femmes... pour assurer les soins en temps de peste, souvent pour remplacer ceux qui ont fui, abandonnant leur poste, car les risques sont considérables[72].



Influences artistiques et culturelles |




Porche central, de style gothique perpendiculaire, de la Cathédrale de Peterborough.


La mort d'artistes, d'ouvriers qualifiés, de mécènes... entraîne des effets directs, notamment l'arrêt ou le ralentissement de la construction des cathédrales, comme celle de la cathédrale de Sienne, dont le projet initial ne sera jamais réalisé. Des historiens anglais attribuent l'apparition du style gothique perpendiculaire aux restrictions économiques liées à la peste noire[73]. En France, la plupart des grands chantiers ne reprendront qu'après 1450[74].


Sur les lieux où la peste s'arrête ou se termine, des chapelles ou autres petits édifices dédiés (chapelles votives, oratoires...) sont construits invoquant ou remerciant la Vierge, des saints locaux, Saint Sébastien ou Saint Roch[75]...



Sensibilités religieuses |


La crainte, de la part des familles riches, des enterrements de masse et des fosses communes, entraîne par réaction un développement de l'art funéraire : caveaux et chapelles familiales, tombes monumentales... Le gisant, statue mortuaire représentant le défunt dans son intégrité physique et en béatitude, tend à être remplacé par un transi, représentant son cadavre nu en décomposition[73].


La peste marque également la peinture. Selon Meiss[76], les thèmes optimistes de la Vierge à l'enfant, de la Sainte Famille et du mariage laissent la place à des thèmes d'inquiétudes et de douleurs[77], comme la Vierge de pitié qui tient, dans ses bras, son fils mort descendu de la croix[73], ou encore celui de la Vierge de miséricorde ou « au manteau » qui abrite et protège l'humanité souffrante[78].


La représentation du Christ en croix passe du Christ triomphant sur la croix à celle du Christ souffrant sur la croix où un réalisme terrible détaille toutes les souffrances : les sueurs de sang, les clous, les plaies, et la couronne d'épines[73].


La représentation du supplice de Saint Sébastien évolue : de l'homme mûr habillé, à celle d'un jeune homme dénudé, juste vêtu d'un pagne à l'image du Christ[73].


Les thèmes millénaristes sont mis en avant : ceux de la fin des temps, de l'Apocalypse et du jugement dernier. Par exemple, en tapisserie la Tenture de l'Apocalypse, dans l'art des vitraux, ceux de la cathédrale d'York[79].



Macabre et triomphe de la mort |




Rencontre des trois morts et des trois vifs (Les Petites Heures de Jean de Berry).


L'omniprésence de la mort souligne la brièveté et la fragilité de la vie, thème traité par des poètes comme Eustache Deschamps, Charles Chastellain, Pierre Michault... jusqu'à François Villon. La poésie amoureuse insiste sur la mort de l'être aimé et le deuil inconsolable[80].


Selon Michel Vovelle, le thème de la vie brève s'accompagne d'une « âpreté à vivre », avec la recherche de joies et de plaisirs, comme dans l'œuvre de Boccace, le Décaméron[80].


Dès le XIIIe siècle, des thèmes macabres apparaissent comme le Dit des trois morts et des trois vifs sur des fresques ou des miniatures, où de jeunes gens rencontrent des morts-vivants qui leur parlent : « nous avons été ce que vous êtes, vous serez ce que nous sommes ». Apparu en Italie et en France, ce thème se répand et se développe jusqu'au XVIe siècle. Un autre thème plus célèbre est celui de la danse macabre où les vivants dansent avec les morts, ce thème se retrouve surtout sur les fresques d'églises de l'Europe du Nord[81].


Selon Vovelle : « C'est à peine exagérer que de dire que, jusqu'à 1350, on n'a point su comment représenter la mort, parce que la mort n'existait pas. »[82]. De rares représentations avant cette date, la montrent comme un monstre velu et griffu, à ailes de chauve-souris. Cette mort figurée perd ses références chrétiennes en rapport avec le péché et le salut.




La mort et les trois âges de la femme (Hans Baldung, 1510).


Elle devient une image autonome et « laïque » : c'est un transi avec une chevelure féminine, qui se décharne de plus en plus jusqu'au squelette proprement dit. C'est la mort implacable, d'origine pré-chrétienne, celle que rappelle le Memento mori.


Cette mort monte à cheval, armée d'une faux ou d'un arc, elle frappe en masse. C'est le thème du triomphe de la mort, dont les représentations les plus célèbres sont celles du palais Sclafani à Palerme, et Le Triomphe de la Mort de Brueghel[82].


Au XVe siècle, et jusqu'à 1650, toute une littérature se développe sur « l'art de bien mourir », c'est l'Ars moriendi. Il s'agit de rituels destinés à se substituer à l'absence de prêtres (en situation d'épidémie de peste). Différentes versions apparaissent après la Réforme : anglicane, luthérienne et calviniste[73].


Des thèmes picturaux se rattachent directement à la peste noire, comme celui du nourrisson s'agrippant au sein du cadavre de sa mère. Selon Mollaret, ces œuvres « sont d'hallucinants documents, en particulier lorsqu'elles furent peintes par des artistes ayant personnellement vécu la peste »[78].


Avec Hans Baldung (1484-1545) apparait le thème de la femme nue au miroir où la mort montre un sablier. Ce serait un premier exemple de peintures de vanité, où la mort-squelette laissera la place à des objets symboliques : sablier, horloge, lampe éteinte, bougie presque consumée, crâne, instrument de musique aux cordes brisées[78]...



Poésie en Islam |


De nombreux passages poétiques sont incorporés dans des chroniques historiques ou médicales, comme celles de Ibn al-Wardi (en) (mort en 1349) d'Alep, ou d'Ibrahim al-Mimar du Caire. Les descriptions poétiques de la peste noire expriment l'horreur, la tristesse, la résignation religieuse mais aussi l'espoir des musulmans en situation épidémique[83].



Dans la littérature moderne |


Plusieurs uchronies ont été écrites sur le thème de la peste noire. Ainsi, dans La Porte des mondes de Robert Silverberg, l’auteur imagine que la peste noire est bien plus meurtrière, éliminant les trois quarts de la population européenne et changeant complètement l’histoire du monde. Cette idée est également reprise par Kim Stanley Robinson dans Chroniques des années noires, mais dans cette uchronie c'est la totalité des habitants de l’Europe qui périt, entraînant, de la même façon que dans le roman précédent, une histoire complètement différente de celle que l'on connaît.


Connie Willis donne aussi ce cadre à son roman, Le Grand Livre, où une historienne du XXIIe siècle qui voyage dans le temps tombe par erreur en pleine peste noire, la confrontant ainsi aux horreurs de cette pandémie.


Ken Follett représente bien les conséquences de la peste noire dans son roman Un monde sans fin où les habitants de la ville fictive de Kingsbridge doivent affronter l'épidémie. L'auteur s'attarde particulièrement sur les différentes stratégies pour guérir les malades et les mesures entreprises par la ville pour diminuer la propagation de la peste.



Notes et références |





  1. a b c et dFrançois de Lannoy, Pestes et épidémies au moyen-âge, Ouest-France, 2016(ISBN 978-2-7373-6719-9), p. 25.


  2. a et b(en) Katharine Park, Black Death, Cambridge University Press, 1993(ISBN 0-521-33286-9), p. 612-615
    dans The Cambridge World History of Human Disease, K.F. Kiple (Ed.)
    .



  3. Mais, par exemple, « mort noire » est utilisé pour le titre de cet article récent du National Geographic.


  4. « Adrien Phillippe (1801-1858) - Auteur - Ressources de la Bibliothèque nationale de France », sur data.bnf.fr (consulté le 1er octobre 2018)


  5. Adrien Phillippe, Histoire de la peste noire, À la direction de publicité médicale, 1853(lire en ligne)


  6. A. Manuila, Dictionnaire français de Médecine et de Biologie, t. III, Masson, 1972, p. 268.


  7. a b c d et eVivian Nutton, « Introduction », Medical History. Supplement, no 27,‎ 2008, p. 1–16 (ISSN 0950-5571, PMID 18575079, PMCID PMC2632864, lire en ligne)


  8. Christine Renardy, « Un témoin de la Grande Peste : Maître Simon de Couvin, chanoine de Saint-Jean l'Évangéliste à Liège », Revue belge de philologie et d'histoire, vol. 52, no 2,‎ 1974, p. 273–292 (ISSN 0035-0818, DOI 10.3406/rbph.1974.3096, lire en ligne)


  9. François de Lannoy 2016, op. cit., p. 18.


  10. Lars Walløe, 3 Medieval and Modern Bubonic Plague: Some Clinical Continuities, vol. 27, 1er février 2008(lire en ligne)


  11. Jean-Noël Biraben, Les maladies en Europe, Seuil, 1995(ISBN 2-02-022138-1), p. 303.
    dans Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1, « Antiquité et Moyen Âge », Mirko D. Grmek (dir.).



  12. a et bJean-Noël Biraben 1975, p. 55.


  13. (en) N. J. Besansky, S. Haensch, R. Bianucci, M. Signoli, M. Rajerison, M. Schultz, S. Kacki, M. Vermunt, D. A. Weston, D. Hurst, M. Achtman, E. Carniel, B. Bramanti « Distinct Clones of Yersinia pestis Caused the Black Death », PLoS Pathogens, 2010;6(10):e1001134. DOI:10.1371/journal.ppat.1001134.


  14. « Le contexte historique de la création du franc - La Peste noire », Bibliothèque nationale de France (consulté le 15 septembre 2007).


  15. Louis Bréhier, Le monde byzantin : Vie et mort de Byzance, Albin Michel, coll. « L'Évolution de l'Humanité » (ISBN 978-2226171023, lire en ligne), p. 425.


  16. François de Lannoy 2016, op. cit., p. 29.


  17. a et bBoris Bove, Le Temps de la guerre de Cent Ans 1328-1453, Édition Belin, 2009.


  18. (en) Schmid BV, Büntgen U, Easterday WR, Ginzler C, Walløe L, Bramanti B, Stenseth NC, « Climate-driven introduction of the Black Death and successive plague reintroductions into Europe », Proc Natl Acad Sci U S A., vol. 112, no 10,‎ 2015, p. 3020-5. (PMID 25713390, DOI 10.1073/pnas.1412887112, lire en ligne [html]) modifier.


  19. a b et c(en) C. Tsiamis, « Epidemic waves of the Black Death in the Byzantine Empire (1347-1453 AD) », Infections in the history of medicine, no 3,‎ 2011, p. 194-201.


  20. Décrit par Michel de Piazza dans ses chroniques Historia Secula ab anno 1337 ad annum 1361.


  21. Notamment la grande famine de 1315 à 1322.


  22. Notamment de typhus.


  23. Dont la guerre de Cent Ans, qui débuta en 1336.


  24. Pierre Pinta, Le Liban, Kathala Éditions, 1995 (ISBN 2865376176 et 9782865376179), p. 66-67.


  25. Jonathan Duhoux, La Peste noire et ses ravages. L’Europe décimée au XIVe siècle, 50 Minutes, 2015, p. 16.


  26. a et bJean Kerhervé, La naissance de l'État moderne, 1180-1492, Hachette, coll. « Carré histoire / Histoire de la France », 2004(ISBN 978-2-01-144934-4), p. 120-123.


  27. Georges Minois, La guerre de cent ans, Perrin, coll. « Tempus », 2016(ISBN 978-2-262-06454-9), p. 72-73 et 134-135..


  28. Joseph P. Byrne 2012, p. 179-180.


  29. Joseph P. Byrne 2012, p. 22.


  30. Bruno Halioua, Histoire de la médecine, Masson, 2004, 272 p. (ISBN 2294010566, lire en ligne), « La grande peste ou peste noire », p. 103.


  31. ABC/Reuters, « Black death 'discriminated' between victims (ABC News in Science) », Australian Broadcasting Corporation,‎ 29 janvier 2008(lire en ligne)


  32. « Health. De-coding the Black Death », BBC,‎ 3 octobre 2001(lire en ligne)


  33. G. d'Avenel, cité dans Jacques Friggit, « De Philippe Auguste à François Hollande, le prix des logements à Paris sur huit siècles », CGEDD, août 2012.


  34. Jean Kerhervé 2004, op. cit., p. 130.


  35. Jean-Noël Biraben 1975, p. 157-170.


  36. Jean-Noël Biraben 1975, p. 171-174.


  37. Jean-Noël Biraben 1975, p. 174-184.


  38. François de Lannoy 2016, op. cit., p. 32.


  39. Smaïl Goumeziane, op. cit., p. 13-14.


  40. [PDF] Ibn Khaldoun, trad. William Mac Guckin de Slane, Les Prolégomènes (première partie), éd. Librairie orientaliste Paul Geuthner, Paris, 1863, p. 133.


  41. Joseph P. Byrne 2012, p. 106-107.


  42. a b et cJean-Noël Biraben 1975, p. 57.


  43. Pour plus d'information sur les persécutions dont les Juifs furent l'objet à la suite de la peste noire, on se reportera à l'Histoire des Juifs par Heinrich Graetz.


  44. (en) Richard Gottheil et Meyer Kayserling, « Communal organisation », Jewish Encyclopedia (consulté le 3 novembre 2007).


  45. a b c et dJean-Noël Biraben 1975, p. 54-65.


  46. Sous la direction d’Élie Barnavi, Histoire universelle des Juifs, 1992, Hachette.


  47. Lazare Landau, « Le massacre de la Saint-Valentin », site internet du judaïsme d'Alsace et de Lorraine (consulté le 3 novembre 2007).


  48. « Grande Peste en Europe : 25 millions de victimes (autant en Asie) », Eurocles (consulté le 3 novembre 2007).


  49. D. Jacquart, Le milieu médical en France du XIIe au XVe siècle, Genève, Droz, 1981, p.162-163.


  50. a et bJoseph P. Byrne 2012, p. 192-195.


  51. « Exposition 2007 du Musée de Cluny : Trésors de la peste noire. », sur musee-moyenage.fr (consulté le 21 août 2018)


  52. Boris Bove, Le Temps de la guerre de Cent Ans 1328-1453, Éditions Belin, 2009, p. 294.


  53. a b c et dJean-Noël Biraben 1995, op. cit., p. 309-310.


  54. a b et cJoseph P. Byrne 2012, p. 99.


  55. Jean-Noël Biraben 1976, p. 9-17.


  56. a et bJoseph P. Byrne 2012, p. 9-10.


  57. a et bJoseph P. Byrne 2012, p. 310-312.


  58. Joseph P. Byrne 2012, p. 118.


  59. Graus František. « Autour de la peste noire au XIVe siècle en Bohême », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 18e année, no 4, 1963. p. 720-724. DOI:10.3406/ahess.1963.421041.


  60. Jean-Noël Biraben 1976, p. 63-74.


  61. François de Lannoy 2016, op. cit., p. 41.


  62. Jean-Noël Biraben 1976, p. 60-61.


  63. a et bJean-Noël Biraben 1976, p. 167-169.


  64. a et bJean-Noël Biraben 1976, p. 119-123.


  65. Joseph P. Byrne 2012, p. 92-94.


  66. Joseph P. Byrne 2012, p. 152-154.


  67. Jean-Noël Biraben 1976, p. 114-115.


  68. a et bJean-Noël Biraben 1976, p. 102-103.


  69. a et bF. de Lannoy 2016, op. cit., p. 53.


  70. Jean-Noël Biraben 1976, p. 88-90.


  71. a et bJean-Noël Biraben 1976, p. 138-139.


  72. Jean-Noël Biraben 1976, p. 125-127.


  73. a b c d e et fJoseph P. Byrne 2012, p. 23-26.


  74. François de Lannoy 2016, op. cit., p. 71.


  75. Joseph P. Byrne 2012, p. 80-81.


  76. Millard Meiss.


  77. Michel Vovelle, La mort et l'occident, de 1300 à nos jours, Gallimard, 1983(ISBN 2-07-029649-0), p. 100.


  78. a b et cDominique Lecourt, Dictionnaire de la pensée médicale, PUF, 2004(ISBN 2-13-053960-2), p. 866.
    article Peste par Henri H. Mollaret



  79. Michel Vovelle 1983, op. cit., p. 102-104.


  80. a et bMichel Vovelle 1983, op. cit., p. 104-107.


  81. Michel Vovelle 1983, op. cit., p. 112-116.


  82. a et bMichel Vovelle 1983, op. cit., p.119-120.


  83. Joseph P. Byrne 2012, p. 286.




Voir aussi |


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Articles connexes |



  • Peste

  • Liste des épidémies de peste



Bibliographie |




  • Jean-Noël Biraben, Les hommes et la peste en France et dans les pays européens et méditerranéens, t. I : La peste dans l'histoire, Paris - La Haye, Mouton, 1975(ISBN 2-7193-0930-3).

  • Jean-Noël Biraben, Les hommes et la peste en France et dans les pays européens et méditerranéens, t. II : Les hommes face à la peste, Paris - La Haye, Mouton, 1976(ISBN 2-7193-0978-8)



  • Marie-Hélène Congourdeau, « Pour une étude de la peste noire à Byzance » Eupsychia, Mélanges offerts à Hélène Ahrweiler, Byzantina Sorbonensia 16, Paris 1998, p. 149-163.


  • Jean de la Fontaine, Les Animaux malades de la peste.


  • Millard Meiss, La Peinture à Florence et à Sienne après la peste noire (1951), préface de Georges Didi-Huberman, rééd. Hazan, 2013 (ISBN 9782754106405).


  • Yves Morvan, La peste noire à Jenzat. Bulletin Historique et Scientifique de l'Auvergne Clermont-Ferrand, vol. 92, no 682, 1984.


  • Julien Théry, « Peste noire : la grande faucheuse », National Geographic Histoire, 4, 2013, p. 70-79, disponible en ligne.


  • (en) Joseph P. Byrne, Encyclopedia of the Black Death, ABC-CLIO, 2012(ISBN 978-1-59884-253-1).



Filmographie |




  • Le Septième Sceau (1957), film d'Ingmar Bergman sur la rencontre entre un chevalier de retour de croisade et la Mort.


  • Le Joueur de flûte (1972), film de Jacques Demy sur une légende germanique se déroulant durant la période de la peste noire.


  • Le Dernier des Templiers (2010), film de Dominic Sena : durant les croisades du XIVe siècle, une jeune sorcière est soupçonnée d'être à l'origine d'une épidémie de la peste noire. Deux chevaliers templiers déserteurs, Behmen (Nicolas Cage) et Felson (Ron Perlman), sont chargés par l'église catholique romaine de la convoyer vers un monastère de moines exorcistes détenteurs d'un manuscrit du roi Salomon.


  • Black Death (2010), film de Christopher Smith : en pleine épidémie, le jeune moine Osmund (Eddie Redmayne) est chargé de mener le chevalier Ulrich (Sean Bean) et son groupe de mercenaires vers un village que la rumeur dit être épargné par la peste et abritant un nécromancien capable de ramener les morts à la vie.


  • L'Oracle (2013), de Philipp Stölzl.



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