Déclaration Balfour de 1917





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Balfour et le texte de la déclaration.


La déclaration Balfour de 1917 est une lettre ouverte datée du 2 novembre 1917 et signée par Arthur Balfour, le Foreign Secretary britannique. Elle est adressée à Lord Lionel Walter Rothschild (1868-1937), éminence de la communauté juive britannique et financier du mouvement sioniste, aux fins de retransmission.



« Cher Lord Rothschild,
J'ai le grand plaisir de vous adresser, de la part du Gouvernement de Sa Majesté, la déclaration suivante, sympathisant avec les aspirations juives sionistes, déclaration qui, soumise au cabinet, a été approuvée par lui.
Le Gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un Foyer national pour les Juifs et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif, étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte soit aux droits civiques et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, soit aux droits et aux statuts politiques dont les Juifs disposent dans tout autre pays.
Je vous serais obligé de porter cette déclaration à la connaissance de la Fédération sioniste (en). »



— Arthur James Balfour[1].


La déclaration est publiée dans le Times de Londres le 9 novembre, dans l'encart « Palestine for the Jews. Official Sympathy. »


Par cette lettre, le Royaume-Uni se déclare en faveur de l'établissement en Palestine d'un foyer national juif. Cette déclaration est considérée comme une des premières étapes dans la création de l'État d'Israël[2]. En effet, la promesse qu'elle contient sera mise en œuvre durant la conférence de Paris (1919), préalable à la conférence de San Remo (avril 1920), confirmée par le traité de Sèvres (août 1920).




Sommaire






  • 1 Préalable


  • 2 Motivations géopolitiques


    • 2.1 Ressources du sous-sol


    • 2.2 Présence occidentale


    • 2.3 Sionisme chrétien


    • 2.4 Revirement d'alliance de la diaspora


    • 2.5 Autres explications


      • 2.5.1 Endiguement de la France






  • 3 Controverse


  • 4 Symbole


  • 5 Notes et références


  • 6 Voir aussi


    • 6.1 Bibliographie


    • 6.2 Articles connexes


    • 6.3 Liens externes







Préalable |


À l'aube de la Première Guerre mondiale, la Palestine fait partie de l'Empire ottoman. C'est l'une des dernières régions que garde l'Empire en déclin, qui avait déjà perdu au cours du XIXe siècle la plupart de ses territoires européens, le Maghreb et le Machrek.


Il est malgré tout l'un des Empires centraux engagés dans le conflit, gardant des liens forts avec l'Allemagne. Les grandes puissances traduisent leur convoitise par des visées différentes : l'achèvement du chemin de fer Berlin-Bagdad, du côté allemand, le remodelage de la région, du côté britannique, que consacrent les accords secrets franco-britanniques, dits Sykes-Picot, et le soutien officiel au nationalisme arabe.


La grande révolte arabe de 1916-1918 brise l'État ottoman et ouvre plusieurs brèches dans les zones arabes. Les Britanniques secondés par les Français et les Italiens relancent en mars 1917 la campagne en Palestine, mais un premier échec, puis un second, conduisent au renvoi d'une partie du commandement britannique et à six mois d'impasse. Finalement, les troupes britanniques, emmenées par le Général Sir Edmund Allenby, remportent le 31 octobre une victoire décisive à Beer-Sheva, près de Gaza. Le succès se confirme le surlendemain 2 novembre durant la troisième bataille de Gaza.



Motivations géopolitiques |


Plusieurs raisons différentes ont été évoquées pour justifier la décision de Lord Balfour d'engager l'Empire britannique dans le sionisme.



Ressources du sous-sol |


C'est l'époque du « Grand Jeu », selon l'expression de Rudyard Kipling, pour maîtriser les zones riches en pétrole et protéger l'accès aux Indes.


Les Allemands cherchent à achever le chemin de fer Berlin-Bagdad. La campagne de Mésopotamie (1914-15) par les forces britanniques et indiennes cible les gisements de pétrole du Koweït et de Bassorah. Les accords Sykes-Picot, confirmés par le traité de Sèvres, confirment l'importance de l'enjeu pétrolier pour les puissances européennes.


Le don aux Juifs de la Palestine ferait partie d'un plan plus large de contrôle des routes commerciales dans le cadre de ce Grand Jeu. Si l'Irak est proche du golfe Persique, et donc de l'Inde, la Palestine est proche du canal de Suez en Égypte.



Présence occidentale |


D'après Jacob Yeredor, une Palestine en partie juive assure une présence d'origine européenne au Moyen-Orient, région arabe et principalement musulmane[3].



Sionisme chrétien |


D'après l'historien Jill Hamilton,[réf. insuffisante] il s'agirait de satisfaire les protestants du courant dit sioniste chrétien, courant principalement américain mais de retour au Royaume-Uni au XIXe siècle.



Revirement d'alliance de la diaspora |


Le livre de Martin Watts The Jewish Legion during the First World War reprenant des archives jamais publiées retrace les efforts du gouvernement britannique pour trouver une issue à la Première Guerre mondiale. Le mouvement sioniste est une partie prenante dans ces efforts et offre plusieurs solutions au niveau politique, militaire, économique et journalistique. Au niveau politique depuis 1897, le monde juif est politiquement représenté par le mouvement sioniste créé par le journaliste hongrois Théodore Herzl et représenté en Angleterre durant la guerre par le scientifique russe Chaim Weizmann. Au niveau militaire, les nombreux réfugiés russes en Angleterre qui auraient dû se battre dans l'armée russe alliée de l'Angleterre, mais empêchés par les pogroms, ne pouvaient se battre pour l'Angleterre car étrangers. La solution était de les faire se battre dans une légion. La Légion juive comme proposé par le journaliste ukrainien Vladimir Jabotinsky recrutant les réfugiés russes en Angleterre et aux États-Unis, et les réfugiés de Terre sainte au Caire sous administration britannique. Au niveau économique, Chaim Weizmann avait trouvé un procédé pour synthétiser l'acétone nécessaire à la fabrication de la dynamite de façon beaucoup moins chère, ce qui lui valait l'amitié du ministre chargé des fournitures militaires. Le coup médiatique de la déclaration Balfour ainsi que la prise de Jérusalem dans la foulée représentait finalement une motivation pour les Juifs de choisir le camp britannique ce qui, à cette époque, n'était pas une évidence. En effet, les Juifs, patriotes avant tout, défendaient d'abord leur pays fût-il français ou allemand.[style à revoir][4].


D'après le pamphlétaire antisioniste américain Benjamin Freedman[5], la confédération sioniste aurait approché les Anglais en leur proposant d'user d'influence pour amener les États-Unis à faire la guerre à leurs côtés si la Palestine, alors sous domination ottomane et défendue par la Triplice, leur revenait. Jusqu'en 1916, l'Angleterre était encline à accepter un armistice avec les Puissances centrales, mais, selon Freedman, la possibilité d'un engagement américain a changé la donne.


D'ailleurs, dans un article publié le 3 novembre 1930 par l'Agence télégraphique juive (en), Winston Churchill écrivait, en réponse au Livre blanc de Passfield : « L'année 1917 marqua peut-être la période la plus maussade et la plus sombre de la guerre. (…). C'était l'époque où les éléments les plus résolus du gouvernement britannique cherchaient à enrôler toute influence capable de garder unies à la tâche les nations alliées. Le mouvement sioniste, dans le monde entier, était activement proallié, et, en particulier, pro-britannique. Ce mouvement n'était nulle part plus visible qu'aux États-Unis et nos espoirs reposaient dans une large mesure sur la part active que prendraient les États-Unis dans la lutte sanglante qui s'annonçait. Les talentueux dirigeants du mouvement sioniste et ses nombreuses ramifications exercèrent une influence appréciable sur l'opinion américaine et cette influence (…) était constamment en notre faveur. (…) Les Juifs (sionistes aussi bien que non sionistes) (…) ont œuvré pour le succès de la Grande-Bretagne et pour une étroite coopération entre la Grande-Bretagne et les États-Unis. La déclaration Balfour ne doit donc pas être regardée comme une promesse faite pour des motifs sentimentaux, c'était une mesure pratique prise dans l'intérêt d'une cause commune à un moment où cette cause ne pouvait se permettre de négliger aucun facteur d'assistance matérielle ou morale[6]. »


Selon Freedman, cela constitua un changement d'alliance majeur : les pays des Puissances centrales étaient tous favorables aux Juifs, tandis que la Triple-Entente incluait l'Empire russe où les Juifs venaient à peine d’être émancipés (février-mars 1917).


La déclaration semble sceller ce nouveau pacte, juste après la victoire britannique à la bataille de Beer-Sheva du 31 octobre 1917.



Autres explications |




  1. Limiter les dépenses du Royaume-Uni, écrasé sous le poids de l'effort de guerre.[réf. nécessaire]


  2. Favoriser le recrutement des Juifs de Russie pour la guerre mondiale, plutôt que pour la révolution d'Octobre.[réf. nécessaire]


  3. Selon le Premier ministre de l'époque Lloyd George, dans ses Mémoires[réf. insuffisante], remercier Chaim Weizmann pour la synthèse de l'acétone, un composant de la cordite.

  4. Favoriser l'engagement des États-Unis dans la guerre mondiale par la publication d'une lettre secrète de l'Allemagne vers le Mexique afin de planifier une attaque (voir télégramme Zimmermann).[réf. souhaitée]

  5. Considérations antisémites : favoriser le départ des Juifs d'Europe. Motif évoqué par Balfour lui-même[7].



Endiguement de la France |


L'endiguement de la présence française.[réf. nécessaire]



  1. Créer un prétexte altruiste pour préempter la Palestine face à la France.

  2. Créer un « État tampon » entre Suez et le Liban français, afin d'avoir un État ami dans le monde arabe, en cas de troubles postérieurs.



Controverse |


La déclaration Balfour est en contradiction avec les engagements pris auprès des nationalistes arabes qui revendiquent un grand État indépendant (accords Hussein-McMahon en 1915). Le soulèvement arabe fut stratégiquement soutenu par les puissances de l'Entente, en ceci qu'il affaiblissait considérablement l'Empire ottoman.


Ils prolongent en fait les accords Sykes-Picot, conclus secrètement en 1916, qui prévoyaient la mise sous tutelle internationale des possessions ottomanes au Moyen-Orient[8].


Lors du démantèlement de l'Empire ottoman, le monde arabe s'attendait à l'indépendance promise, mais une partie de la population prend connaissance de la déclaration qu'on essayait de lui cacher. Le 7 novembre 1918, une déclaration franco-britannique est diffusée dans toutes les villes et villages contrôlés par les Alliés ainsi que dans les journaux. Les gouvernements britanniques et français y affirment que « l'objectif recherché par la France et la Grande-Bretagne [est] l'établissement de gouvernements et d'administrations nationaux qui détiendront leur autorité de l'initiative et du choix libre des populations indigènes »[9].


Cependant, la conférence de San Remo (1920) ne satisfait aucune des demandes arabes. Les mandats britannique et français en Irak, Syrie, Liban et Palestine remplacent la domination turque sur une grande partie du territoire revendiqué par les panarabistes. En outre, ils permettent l'enracinement du mouvement sioniste, désormais soutenu par l'Empire britannique.



Symbole |



La déclaration est une date marquante pour le mouvement sioniste. Dès novembre 1918, une parade célèbre son premier anniversaire à Jérusalem[10].




La table de travail de Balfour au musée de la Diaspora de Tel Aviv.



Notes et références |





  1. QI 2007.


  2. « Cette lettre ouverte n'a pour les Anglais d'autre intérêt que de rassurer les Juifs américains, plus portés à soutenir les Puissances centrales qu'une alliance où figure la Russie au passé lourdement antisémite. Mais elle va légitimer trente ans plus tard la création de l'État d'Israël. » Hérodote.net.


  3. Yeredor Jacob, « La Palestine et la politique des grandes puissances », Politique étrangère, no 3, 1948, 13e année, p. 235-244. doi : 10.3406/polit.1948.2854.


  4. (en) Martin Watts, The Jewish Legion during the First World War, Palgrave Macmillan, 2004, 287 p. (ISBN 1349519669, présentation en ligne).


  5. Benjamin Freedman, Conférence de 1961. Une mise en garde, Delacroix, trad. fr. 2006.


  6. « Churchill, Author of 1922 White Paper, Takes Issue with Passfield », Jewish Telegraphic Agency, en ligne.


  7. « From Balfour to Obama », sur www.aljazeera.com (consulté le 15 août 2017).


  8. « Déclaration Balfour » sur universalis.fr.


  9. Xavier Baron, Les Palestiniens : Genèse d'une nation, Seuil, 2000, p. 21.


  10. (en) Benny Morris, Righteous Victims : A History of the Zionist-Arab Conflict, 1881-1998, Knopf Doubleday Publishing Group, 2011, 800 p. (ISBN 0307788059, présentation en ligne), p. 158.




Voir aussi |



Bibliographie |




  • [QI 2007] « Document : la déclaration Balfour (2 novembre 1917) », Questions internationales, no 28 « Israël »,‎ novembre – décembre 2007(lire en ligne, consulté le 24 avril 2017).


  • [Compagnon] Olivier Compagnon, « Balfour, déclaration (1917) », sur l'Encyclopædia Universalis (en ligne).


  • [Larousse] Entrée « déclaration Balfour » de l'Encyclopédie Larousse (en ligne).



Articles connexes |



  • Conflit israélo-arabe

  • Conflit israélo-palestinien



Liens externes |




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